Demain se plante aujourd’hui…

Nous sommes ceux que nous attendions !

« En réduisant au silence notre douleur, nous préparions son cri ! « 

Du fin fond du Chiapas, nous parviennent les mots de la raison.

Et aux origines du Chiapas, le Peuple Maya, qui fut annihilé, anéantie presque totalement par les conquistadors et dont les descendants se retrouvent presque en totalité dans ce mouvement qui s’appelle ; EZLN.

Ces mots que nous lisons, ces paroles prononcées et qui résonnent entre nos murs sont ceux de la raison.

Ils sont prononcés pour que nous nous les approprions, sans jamais oublier d’où ils viennent et pour les amplifier…

Parce qu’il faut se préparer à porter plus efficacement et plus extensivement le boulot de nous gouverner nous-mêmes, parce qu’au pire, le Système capitaliste va revenir nous chercher.

Le mal et ceux qui le porte ont un nom, une histoire, une origine, un calendrier, une géographie ; C’est le Système capitaliste.

Depuis des centaines d’années,

nous vivons sous les 4 roues de ce Système ;

L’Exploitation, la Répression, la Dépossession et le Mépris…

Ces paroles constituent un des textes les plus politiquement puissants qu’il m’ait été donné à lire, grâce à R71. Il rassemble quasiment point par point ce que je pense sur la méthodologie du changement de paradigme politique auquel je travaille depuis plus d’un an. Les Zapatistes du sud-est mexicain l’ont fait. Ils nous appellent, nous les peuples du monde, à faire de même et à nous unir.

L’avenir de l’humanité passe par les peuples occidentaux émancipés de l’idéologie colonialiste, se tenant côte à côte avec leurs frères des peuples et nations originels des cinq continents, pour lancer et façonner la société des sociétés, les confédérations d’associations libres autonomes, hors état et hors capitalisme, entités criminelles, parasites et totalement obsolètes.

https://resistance71.wordpress.com/2016/01/05/resistance-politique-message-dunion-de-lezln-chiapas-mexique/

Traduction de l’espagnol par R71 et publié sur son blog

Paroles de l’EZLN en ce 22ème anniversaire du commencement de la guerre contre l’oubli –  1er janvier 2016

http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2016/01/01/palabras-del-ezln-en-el-22-aniversario-del-inicio-de-la-guerra-contra-el-olvido/

Bonne soirée, bonjour compañero et compañera bases de soutien de l’Armée Zapatiste de Liberation Nationale (EZLN), compañero/as miliciens et miliciennes, rebelles, responsables régionaux et locaux, autorités des trois niveaux de gouvernement autonome, compañero/as promoteurs des différentes zones de travail, compañeros et compañeras du sixième (appel) international et à tous ceux présents.
Compañeras et compañeros, nous sommes ici pour célébrer aujourd’hui le 22ème anniversaire du commencement de la guerre contre l’oubli.
Depuis plus de 500 ans, nous avons enduré la guerre que les puissants de différentes nations, de différentes langues, couleurs et croyances, ont menée contre nous afin de nous annihiler.
Ils voulaient nous tuer, que ce soit en tuant nos corps ou en tuant nos idées.
Mais nous résistons.
En tant que peuples originels, en tant que gardiens de la terre-mère, nous résistons.
Pas seulement ici et pas seulement notre couleur, qui est la couleur de la terre.
De tous les coins de la terre qui ont souffert dans le passé et qui souffrent toujours maintenant, il y a eu et il y a toujours des peuples rebelles et dignes qui ont résisté, qui résistent contre la mort imposée d’en haut.
Le 1er janvier 1994, il y a 22 ans, nous avons rendu public notre “¡Ya Basta!”, “Assez !” que nous avions préparé dans un digne silence pendant une décennie.
En réduisant au silence notre douleur, nous préparions son cri.
Notre parole, à cette époque, vint du feu.
Afin de réveiller ceux qui dormaient.
De faire se lever les morts.
Pour faire revenir à la raison ceux qui s’étaient conformés et qui avaient abandonné.
Pour se rebeller contre l’histoire.
Pour la forcer à dire ce qu’elle avait réduit au silence.
Pour révéler l’histoire de l’exploitation, des meurtres, des dépossessions, du manque de respect en oubliant que cela se cachait derrière l’histoire d’en haut.
Cette histoire de musées, de statues, de livres et de monuments au mensonge.
Avec la mort de notre peuple, avec notre sang, nous avons stupéfié un monde résigné à la défaite.
Ce ne fut pas seulement des mots. Le sang de nos compañeros tombés dans ces 22 années fut ajouté au sang de ceux des années précédentes, des décennies et des siècles.
Nous avons alors dû choisir et nous avons choisi la vie.
C’est pourquoi, alors et maintenant, afin de vivre, nous mourrons.
Notre parole d’alors était aussi simple que notre sang repeignant les murs des rues des villes où ils nous manquent de respect aujourd’hui comme alors.
Et cela continue :
L’étendard de notre lutte fut nos 11 demandes : terre, travail, nourriture, santé, éducation, logement décent, indépendance, démocratie, liberté, justice et paix.
Ces demandes constituèrent ce qui nous fit nous révolter en armes car ce furent ces choses que nous, le peuple originel et la vaste majorité du peuple de ce pays et du monde entier, ont besoin.
De cette manière, nous avons commencé notre lutte contre l’exploitation, contre la marginalisation, l’humiliation, le manque de respect, l’oubli et toutes les injustices que nous avons vécues et qui furent causées par le mauvais système (colonial).
Parce que nous ne sommes utiles aux riches et aux puissants que comme leurs esclaves afin qu’ils deviennent de plus en plus riches et que nous devenions de plus en plus pauvres.
Après avoir vécu pendant si longtemps sous cette domination et pillage perpétuel nous avons dit :
ASSEZ ! ICI S’ARRÊTE NOTRE PATIENCE !
Et nous avons vu que nous n’avions pas d’autre choix que de prendre les armes pour tuer ou pour mourir pour une juste cause.
Mais nous ne fûmes pas seuls.
Nous ne le sommes pas non plus maintenant.
Au Mexique et dans le monde, la dignité est descendue dans les rues et a demandé un espace pour la parole.
Nous comprîmes.
Dès ce moment, nous avons changé la forme de notre lutte. Nous étions et sommes toujours une oreille attentive et ouverte sur le monde, parce que depuis le départ nous savions qu’une lutte juste du peuple est pour la vie et non pas pour la mort.
Mais nous avons nos armes à nos côtés, nous ne nous en sommes pas débarrassés, elles seront avec nous jusqu’à la fin.
Parce que nous voyons que là où notre oreille fut un cœur ouvert, le dirigeant a utilisé sa parole mensongère ainsi que son cœur fourbe et ambitieux contre nous.
Nous avons vu que la guerre d’en haut continuait.
Leur plan et objectif furent et est toujours de nous faire la guerre jusqu’à ce qu’ils puissent nous exterminer. C’est pourquoi au lieu de répondre à nos justes demandes, ils préparèrent et préparent, firent et font la guerre avec leurs armes modernes, entraînent et financent les escadrons paramilitaires, donnent et distribuent des miettes de leur butin prenant avantage de la pauvreté et de l’ignorance de certains.
Ces dirigeants d’en haut sont stupides. Ils pensent que ceux qui étaient d’accord pour écouter seraient aussi d’accord pour se vendre, se rendre et abandonner.
Ils ont eu tort alors.
Ils ont tort maintenant.
Parce que, nous, les Zapatistes savons très bien que nous ne sommes pas des mendiants ou des bons-à-rien qui espèrent que tout va simplement s’arranger de soi-même.
Nous sommes un peuple qui a de la dignité, de la détermination et la conscience de combattre pour la véritable liberté et la justice pour tous et ce quelques soit la couleur, la race, le genre, la croyance, le calendrier ou la géographie.
C’est pourquoi notre lutte n’est pas locale, régionale ni même nationale. Elle est universelle.
Parce que les injustices, les crimes, les dépossessions, le manque de respect et l’exploitation sont universels.
Mais aussi telle est la rébellion, la rage, la dignité et le désir profond de toujours faire mieux.
C’est pourquoi nous avons compris qu’il était nécessaire de bâtir notre vie nous-mêmes, avec autonomie.
Sous les menaces majeures, le harcèlement militaire et paramilitaire et les provocations constantes du mauvais gouvernement, nous avons commencé à former notre propre système de gouvernance, notre autonomie, avec notre propre système d’éducation, notre propre système de santé, notre propre communication, notre façon de nous occuper et de travailler avec notre terre-mère, notre propre politique en tant que peuple et notre propre idéologie sur le comment nous voulons vivre en communautés, avec une autre culture.
Là où d’autres espèrent que ceux d’en haut vont résoudre les problèmes de ceux d’en bas, nous les Zapatistes ont commencé à construire notre liberté comme elle est semée, construite, là où elle pousse, c’est à dire, d’ici, d’en bas…
Mais le mauvais gouvernement essaie de détruire et de mettre fin à notre lutte et notre résistance avec une guerre qui change en intensité comme elle change de politique mensongère, avec ses mauvaises idées, ses mensonges, utilisant les médias pour les propager et en donnant des miettes aux communautés indigènes où les zapatistes vivent afin de les diviser et d’acheter la conscience des gens à très bon marché, mettant ainsi en place leur plan de contre-insurrection.
Mais la guerre qui vient d’en haut, compañeras et compañeros, frères et sœurs, est toujours la même: elle n’amène que mort et destruction.
Les idées et les drapeaux peuvent bien changer avec qui est en charge, mais les guerres d’en haut détruisent toujours, tuent toujours, ne sèment jamais rien d’autre que la terreur et le désespoir.
Au milieu de cette guerre, nous avons dû marcher vers ce que nous voulions.
Nous ne pouvions pas nous assoir et attendre la compréhension de ceux qui ne comprennent même pas qu’ils ne comprennent pas.
Nous ne pouvions pas nous assoir et attendre pour que le criminel d’en haut se répudie lui-même et son histoire et se convertisse, repentant, en une bonne personne.
Nous ne pouvions pas nous assoir et attendre pour qu’une très grande liste de promesses qui seront oubliées quelques minutes après avoir été faites, ne se réalisent jamais.
Nous ne pouvions pas attendre pour l’autre, différent, mais avec la même douleur et la même colère, de nous regarder et en nous regardant, de voir.
Nous ne savions pas comment le faire.
Il n’y avait pas de livre, pas de manuel ou de doctrine qui nous ont dit que faire afin de résister et simultanément, de construire quelque chose de nouveau, de meilleur.
Peut-être pas parfait bien sûr, peut-être différent, mais toujours à nous, à notre peuple, les femmes, les hommes, les enfants, les anciens qui, dans leur cœur collectif, couvrent le drapeau noir avec une étoile rouge à cinq branches et les lettres qui leur donnent non seulement un nom, mais aussi un but, une destinée : EZLN.
Alors nous avons recherché dans notre histoire ancestrale, dans notre cœur collectif et au travers des hoquets, des faiblesses et des erreurs, nous avons construit ce que nous sommes et ce qui non seulement nous fait continuer à vivre et à résister, mais aussi nous élève dignifiés et rebelles.
Pendant ces 22 années de lutte et de résistance, de rébellion, nous avons continué à construire une autre forme de vie, nous nous sommes gouvernés nous-mêmes en tant que peuple, que collectif que nous sommes, en accord avec les sept principes de diriger en obéissant, construisant un nouveau système et une autre forme de vie en tant que peuples originels.
Un système où le peuple commande et le gouvernement obéit.
Et nous voyons, depuis notre cœur simple, que ceci correspond à la manière la plus saine, parce qu’elle est née et grandit du peuple lui-même. C’est le peuple qui donne ses opinions, discute, pense, analyse, fait des propositions et décide ce qui est le mieux pour tout le monde, suivant en cela l’exemple de nos ancêtres.
Comme nous l’expliquerons plus en détail plus tard, nous voyons bien que la négligence et la pauvreté règnent dans les communautés partidista (les suiveurs de partis politiques) ; elles sont gérées par la fainéantise et le crime, brisant la vie communautaire, déchirée fatalement et irrémédiablement.
Se vendre au mauvais gouvernement n’a non seulement pas résolu leurs problèmes de base, mais leur a donné encore plus d’horreurs à gérer. Là où avant il y avait la faim et la pauvreté, il y avait maintenant la faim, la pauvreté et le désespoir. Les communautés partistada sont devenues des foules de mendiants qui ne travaillent pas, qui ne font qu’attendre le prochain programme d’aide du gouvernement (mexicain), c’est à dire, la prochaine saison électorale.
Ceci ne figure bien sûr pas dans quelque rapport d’état fédéral ou de gouvernement municipal que ce soit, mais c’est la vérité de terrain et peut se voir dans les communautés partidista: celles des paysans fermiers qui ne savent plus comment travailler la terre, vivant dans des blocs de ciment avec des toits en tôles d’aluminium, vides parce qu’on ne peut pas manger le ciment ni le métal, des communautés qui n’existent que pour recevoir l’aumône, les miettes du gouvernement.
Peut-être que dans nos communautés il n’y a pas de maisons en ciment ou de télévisions numériques ou des camions tous neufs, mais nos gens savent très bien comment travailler la terre. La nourriture est sur toutes les tables, les habits qu’ils portent, les médicaments qu’ils utilisent, la connaissance qu’ils acquièrent, la vie qu’ils mènent sont LES LEURS, ainsi que leur connaissance et le produit de leur travail. Cela ne provient de personne d’autre.
Nous pouvons dire ceci sans honte aucune : Les communautés zapatistes ne sont pas seulement mieux qu’elles ne l’étaient il y a 22 ans, mais leur qualité de vie est bien meilleure que dans celles qui se sont vendues aux partis politiques de toutes couleurs et rayures possibles.
Avant, afin de savoir si quelqu’un était zapatiste, il suffisait de chercher un grand mouchoir rouge ou une cagoule noire.
Maintenant, il suffit de voir s’ils travaillent la terre, s’ils s’occupent de leurs cultures. S’ils étudient les sciences et la technologie, s’ils respectent les femmes que nous sommes, si leur regard est direct et clair, s’ils savent que c’est le collectif qui dirige. S’ils voient le travail du gouvernement autonome zapatiste en rébellion comme un service et non pas comme un business ; si vous leur demandez quelque chose qu’ils ne savent pas, ils vous répondent: “je ne sais pas… encore…” Si lorsque quelqu’un se moque d’eux en disant que les Zapatistes n’existent plus ou qu’ils sont peu nombreux, ils répondent: “ne vous inquiétez pas, nous serons plus nombreux, cela prendra un peu de temps, mais nous serons bien plus nombreux” ; si leurs regards observent loin dans les calendriers et les géographies ; s’ils savent que demain se plante aujourd’hui.
Nous reconnaissons bien évidemment qu’il y a encore beaucoup à faire, nous devons nous organiser mieux et nous organiser plus.
C’est pourquoi nous devons faire un encore plus grand effort pour nous préparer à porter plus efficacement et plus extensivement le boulot de nous gouverner nous-mêmes, parce qu’au pire, le système capitaliste va revenir nous chercher.
Nous devons savoir comment le confronter. Nous avons déjà 32 ans d’expérience dans la lutte de rébellion et la résistance.
Et nous sommes devenus ce que nous sommes.
Nous sommes l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (NdT : EZLN est l’acronyme espagnol pour Ejercito Zapatista de Liberación Nacional).
C’est ce que nous sommes bien qu’ils ne nous nomment pas.
C’est ce que nous sommes même s’ils nous oublient par le silence et la calomnie.
C’est ce que nous sommes bien qu’ils ne nous voient pas.
C’est ce que nous sommes par nos pas, notre chemin, dans notre origine et dans notre destinée.
Nous regardons ce que nous étions auparavant et ce qui est maintenant.
Une nuit sanglante, pire qu’avant si c’est possible, s’étend au monde.
Le dirigeant n’est pas seulement programmé pour continuer à exploiter, à réprimer, à maltraiter et à déposséder, mais il est déterminé à détruire le monde entier si ce faisant il peut en tirer un profit quelconque, de l’argent, un salaire.
Il est clair que le pire est à venir pour nous tous.
Les multimillionnaires de quelques pays continuent leur objectif de piller les ressources naturelles du monde entier, tout ce qui nous donne la vie comme l’eau, la terre, les forêts, les montagnes, les rivières, l’air et tout ce qu’il y a sous le sol: l’or, le pétrole, le gaz, l’uranium, l’ambre, le soufre, le carbone et autres minéraux et minerais.
Ils ne considèrent pas la terre comme une source de vie, mais comme un business par lequel ils peuvent tout transformer en commodités et donc en argent, et en faisant cela ils vont totalement nous détruire tous.
Le mal et ceux qui le porte ont un nom, une histoire, une origine, un calendrier, une géographie: c’est le système capitaliste.
Aucune importance de quelle couleur ils le peignent, quel nom ils lui donnent, de quelle religion ils le déguisent, quel drapeau ils lèvent… C’est le système capitaliste.
C’est l’exploitation de l’humanité entière et de la totalité du monde que nous habitons.
C’est le manque de respect et le dénigrement pour tout ce qui est différent et ce qui ne se vend pas, n’abandonne pas, ne se laisse pas corrompre.
C’est le système qui persécute, incarcère, assassine.
Il vole.
A la tête de ce système, il y a des figures qui émergent, se reproduisent, grandissent et meurent: les sauveurs, les leaders, les caudillos, les candidats, les gouvernements (d’état), les partis politiques qui offrent leurs solutions toutes prêtes.
Ils offrent des recettes, comme une autre commodité, pour résoudre les problèmes.
Peut-être qu’il y a encore quelqu’un quelque part qui croit toujours que d’en haut, là où les problèmes sont créés, viendront aussi les solutions.
Peut-être y a-t-il quelqu’un qui croit en des sauveurs locaux, régionaux, nationaux, mondiaux.
Peut-être y a-t-il ceux qui espèrent toujours que quelqu’un va faire ce que nous devons faire nous-même.
Ce serait bien n’est-ce pas ?
Tout serait si facile, si confortable, ne demanderait pas beaucoup d’efforts. Cela voudrait dire de lever la main, remplir un papier, choisir un nom, mettre le papier dans l’urne, applaudir, crier des slogans, s’affilier à un parti politique et voter pour en virer un et le remplacer par un autre.
Peut-être, disons-nous, nous les Zapatistes, nous pensons, nous sommes ce que nous sommes.
Ce serait bien si les choses étaient comme çà, mais elles ne le sont pas.
Ce que nous avons appris en tant que Zapatistes, et sans que personne ou quoi que ce soit ne nous le disent, sauf notre propre voie en tant qu’enseignant, est que personne, absolument personne ne va venir nous sauver, nous aider, résoudre nos problèmes, soulager notre douleur ou nous amener la justice dont nous avons besoin et que nous méritons.
Il n’y a que ce que nous faisons nous-mêmes, tout le monde dans son propre calendrier et agenda et géographie, en nom collectif, de par la pensée et l’action de tout à chacun individuellement et collectivement, en accord avec sa propre origine et destinée, qui compte.
Nous avons aussi appris en tant que Zapatistes que ceci n’est possible qu’avec organisation.
Nous avons appris qu’il est bon si une personne se mette en colère.
Mais si plusieurs personnes, beaucoup de personnes se mettent en colère, une lumière s’allume dans un coin du monde et sa lueur peut être vue, pour un moment à travers la surface entière de la terre.
Mais nous avons aussi appris que si ces colères s’organisent entre- elles… Ah ! Alors nous n’avons pas qu’un flash momentané qui illumine la surface de la terre.
Alors ce que nous avons est un murmure, comme une rumeur, une secousse qui commence gentiment et croît de plus en plus forte.
C’est comme si le monde allait donner naissance à un autre, un meilleur, plus juste, plus démocratique, plus libre, plus humain… ou humana.. ou humanoa.
C’est pourquoi aujourd’hui nous commençons notre parole avec un mot d’un passé déjà lointain, mais qui continue d’être nécessaire, urgent, vital: Nous devons nous organiser, nous préparer à lutter pour changer cette vie, pour créer un autre mode de vie, une autre manière de nous gouverner en tant que peuples et êtres humains.
Parce que si nous ne nous organisons pas, nous serons tous réduits en esclavage.
On ne peut rien croire du capitalisme. Absolument rien. Nous avons vécu sous ce système depuis des centaines d’années et nous avons souffert sous ses quatre roues: l’exploitation, la répression, la dépossession et le mépris. Maintenant, tout ce que nous avons est notre confiance en les uns les autres, en nous-mêmes. Et nous savons comment créer une nouvelle société, un nouveau système de gouvernement, la vie juste et digne que nous désirons tous.
Maintenant plus personne n’est en sécurité de la tempête que l’hydre capitaliste va déchaîner pour détruire nos vies, pas les autochtones, les fermiers paysans, ouvriers, enseignants, femmes au foyer, intellectuels ou travailleurs en général, parce qu’il y a beaucoup de gens qui travaillent pour survivre leur vie quotidienne, certains avec un patron, d’autres sans, mais tous ceux qui sont pris dans l’étreinte du capitalisme.
En d’autres termes, il n’y a pas de rédemption au sein du capitalisme.
Personne ne va nous mener, nous devons nous mener nous-mêmes, penser ensemble au comment nous allons résoudre chaque situation.
Parce que si nous pensons qu’il va y avoir quelqu’un qui va nous guider, et bien nous avons déjà vu comment ils nous mènent ces derniers siècles passés sous le système capitaliste ; cela n’a pas marché pour nous, les pauvres, pas du tout. Cela a marché pour eux, oui, parce qu’ils sont juste là assis et attendent que l’argent leur tombe dans le bec.
Ils ont dit à tout le monde “votez pour moi”, “je vais me battre pour mettre fin à l’exploitation” et dès qu’ils s’installent derrière le burlingue où ils peuvent engranger du fric sans rien faire, ils oublient automatiquement tout ce qu’ils ont dit et commencent à créer encore plus d’exploitation, pour vendre le peu qui reste des richesses de leurs pays. Ces vendus sont des hypocrites parasites et inutiles, des bons à rien.
Voilà pourquoi, compañeros et compañeras, la lutte n’est pas finie, on ne vient juste que de commencer. On ne s’y est mis que seulement depuis 32 ans, 22 ans publiquement.
C’est pourquoi nous devons mieux nous unir, mieux nous organiser afin de construire notre bateau, note maison, c’est à dire notre autonomie. C’est ce qui nous sauvera de la grande tempête capitaliste qui pointe à l’horizon. Nous devons renforcer nos différentes zones de travail et nos tâches collectives.
Nous n’avons pas d’autre chemin possible que celui de nous unir et de nous organiser pour lutter et nous défendre de la grande menace qu’est le système capitaliste. Parce que le capitalisme criminel qui menace toute l’humanité ne respecte absolument personne: il va nous balayer toutes et tous indépendamment de notre race, religion, ou parti politique. Ceci nous a été démontré par bien des années de mauvais gouvernement, de menaces, de persécutions, d’incarcérations, de torture, de “disparitions” et d’assassinats de gens des peuples des campagnes et des villes du monde entier.
Voilà pourquoi nous disons, compañeros, compañeras, enfants, jeunes gens, vous la nouvelle génération êtes le futur de notre peuple, de notre lutte et de notre histoire ; mais vous devez comprendre que vous avez à la fois une tâche et une obligation: celles de suivre les traces de nos premiers compañeros, de nos anciens, de nos parents, grands-parents et de tous ceux qui ont commencé cette lutte.
Ils ont déjà tracé un bout de chemin, maintenant c’est votre travail de le suivre et de garder le cap. Mais nous ne pourrons faire cela qu’en nous organisant génération après génération, en comprenant cette tâche à effectuer et en nous organisant en conséquence pour y parvenir et en continuant tout ceci jusqu’à la fin de notre lutte.
Vous, les jeunes, êtes une part très importante de nos communautés, c’est pour cela que vous devez participer à tous les niveaux de travail de notre organisation et dans tous les domaines de notre autonomie. Laissons chaque génération continuer de nous mener vers notre destinée de démocratie, de liberté et de justice, tout comme nos premiers compañeros et compañeras nous enseignent maintenant.
Compañeros et compañeras, tous, nous sommes sûrs qu’un jour vous parviendrez à ce que nous voulons: tout pour chacun et rien pour nous, c’est à dire notre liberté. Aujourd’hui, notre lutte est d’avancer pas à pas. Nos armes de lutte sont notre résistance, notre rébellion et notre parole honnête, qu’aucune montagne ni frontière ne peuvent bloquer. Elles vont atteindre les oreilles et les cœurs des frères et des sœurs partout dans le monde !
Chaque jour qui passe, il y a plus de gens qui comprennent que la cause de notre lutte contre la grave situation d’injustice que nous vivons est le système capitaliste dans notre pays et dans le monde entier.
Nous savons également qu’au travers de notre lutte il y a eu et il y aura des menaces, de la répression, des persécutions, de la dépossession, des contradictions et de la moquerie des trois niveaux du mauvais gouvernement. Mais nous devons savoir que le mauvais gouvernement nous hait parce que nous sommes sur la bonne voie, s’il commençait à nous applaudir alors nous saurions que nous avons dévié de notre lutte.
Nous ne devons pas oublier que nous sommes les héritiers de plus de 500 ans de lutte et de résistance, le sang de nos ancêtres coulent dans nos veines, ce sont eux qui nous ont donné l’exemple de la lutte et de la rébellion, le rôle de gardien de notre terre-mère, de laquelle nous sommes nés, sur laquelle nous vivons et à laquelle nous retournerons.
_*_
Compañeros et compañeras Zapatistas
Compañeros et compañeras, compañeroas de la Sixième :
Frères et sœurs:
Ce sont nos premiers mots en ce tout début de nouvelle année.
Plus de paroles et de pensées viendront vers vous.
Petit à petit nous vous montrerons une fois de plus notre regard, notre cœur collectif.
Pour l’heure nous terminerons en vous disant que pour respecter le sang et l’honneur de nos compañeros, il n’est pas suffisant de se souvenir, d’être en deuil, de pleurer, de prier, nous devons plutôt continuer de travailler aux tâches qu’ils nous ont laissé, de créer en pratique le changement que nous voulons tous.
Il n’est pas temps maintenant de battre en retraite, d’être découragés ou fatigués ; nous devons être encore plus fermes dans notre lutte, pour maintenir la parole et l’exemple que nos premiers compañeros nous ont laissés: n’abandonnez pas, ne vous laissez pas acheter, ne pliez pas !
C’est pourquoi, compañeros et compañeras, ce jour important est le temps pour nous de réaffirmer notre volonté dans la lutte, d’aller de l’avant quoi qu’il en coûte et quoi qu’il arrive, sans laisser le système capitaliste détruire ce que nous avons gagné et le peu que nous avons été capables de construire en travaillant pendant ces 22 années : notre liberté !
DÉMOCRATIE ! LIBERTÉ ! JUSTICE !
Depuis les montagnes du sud-est mexicain
Pour le comité clandestin révolutionnaire indigène – Commandement Général de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale

Subcomandante Insurgente Moisés

Subcomandante Insurgente Galeano.
Mexique, le 1er Janvier 2016.

Le moins que l’on puisse  faire, c’est de relayer ce discours prononcé depuis les montagnes du sud-est mexicain.

Soyons des passeurs d’idées, si pour le moment nous ne pouvons rien faire d’autre.

Faisons au moins cela…

JBL1960

Mise à jour du 16/05/2016 par JBL1960 :

https://resistance71.wordpress.com/2016/05/14/et-pendant-ce-temps-la-dans-les-communautes-zapatistes/

4 réflexions sur « Demain se plante aujourd’hui… »

  1. A reblogué ceci sur La vérité est ailleurset a ajouté:
    L’avenir de l’humanité passe par les peuples occidentaux émancipés de l’idéologie colonialiste, se tenant côte à côte avec leurs frères des peuples et nations originels des cinq continents, pour lancer et façonner la société des sociétés, les confédérations d’associations libres autonomes, hors état et hors capitalisme, entités criminelles, parasites et totalement obsolètes. A méditer!

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